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Oct 02, 2023

Découvrez les « Einstein » et son grand mystère mathématique

Ils sont connus sous le nom d'Einstein, non pas en référence au célèbre physicien, mais comme un jeu de mots sur l'expression allemande ein stein, signifiant une pierre. Bien que dans ce cas, il serait plus approprié de le traduire par une seule tuile, en référence à une forme fermée qui peut couvrir une surface sans laisser de vide. Bref, une tesselle, mais avec des caractéristiques uniques qui ont conduit à la solution de l'un des grands mystères mathématiques.

Les tesselles ou carreaux de type Einstein se caractérisent par le fait qu'ils sont apériodiques, ce qui signifie que lorsqu'ils sont disposés ensemble en mosaïque, ils sont capables de couvrir un plan infini dans son intégralité, mais en même temps, sans former de motifs répétitifs, donc qu'aucune sorte de symétrie ne peut être discernée. Quelle que soit la manière dont on divise la mosaïque, chaque section est unique, aucune ne répétant le motif d’une autre. Les Einstein sont l’équivalent mosaïque des nombres irrationnels.

Cette conception semble incroyable, voire impossible, car il est difficile d'imaginer que dans une extension infinie, deux régions ou sections, aussi petites soient-elles, ne puissent coexister avec la même disposition de pavage. En fait, depuis plus d’un demi-siècle, les mathématiciens doutent que cela soit possible. Et puis, en mars 2023, la découverte du « chapeau » s’est confirmée : l’insaisissable Einstein.

Presque aussitôt présenté au public, le chapeau a été adopté par divers artistes et créateurs comme motif de leurs créations, dont certaines sont de véritables jeux en soi. Par exemple, dans cette composition créée par l'artiste et mathématicien américain Robert Fathauer, il faut identifier combien de chemises et combien de chapeaux il y a :

Dans cette mosaïque, les chapeaux ont été transformés en tortues et le défi est d'identifier l'autre tortue reflétée, celle dont la tête est tournée vers la gauche :

Le problème de l'existence ou de la non-existence de ce type de forme a commencé en 1961, lorsque le mathématicien chinois Hao Wang a formulé ce qu'on appelle la « conjecture de Wang », dans laquelle il suggérait que tout ensemble de formes ou de pavages pouvant couvrir un espace dans son intégralité, il permet également un pavage périodique. Cette conjecture a cependant été réfutée cinq ans plus tard, en 1966, par le mathématicien Robert Berger, qui a également identifié le premier ensemble de pièces apériodiques : un « monstre » de 20 426 formes de carreaux capables de prouver l’apériodicité.

À partir de ce moment, de nombreux mathématiciens se sont mis à découvrir un ensemble de formes toujours plus restreint. Cette quête a été lancée en 1974 par le brillant physicien et mathématicien Roger Penrose, qui a présenté une solution élégante basée sur deux formes très simples baptisées « le cerf-volant » et « la fléchette ».

Le physicien et mathématicien Roger Penrose a présenté une solution élégante basée sur deux formes très simples baptisées « le cerf-volant » et « la fléchette ». Crédit : Propre conception

Depuis, et malgré des efforts constants, personne n’est parvenu à réduire le nombre de formes au minimum. Autrement dit, trouver un design unique capable de mosaïquer une surface infinie sans aucune périodicité.

Dans ce jeu, le but est de remplir chacune des planches en assemblant les pièces qui l'accompagnent :

Par un coup du sort, il y a quelques mois, en novembre 2022, David Smith, un britannique passionné de mathématiques à la retraite, a réussi à résoudre cette énigme insaisissable. D’abord en jouant avec un programme informatique qui lui permettait de concevoir et d’assembler différentes formes. Puis, lorsqu’il a trouvé un design prometteur, il a découpé un certain nombre de morceaux de papier pour expérimenter. C'est ainsi, presque comme s'il jouait à un jeu d'enfant, qu'il découvrit « le chapeau », un polygone à 13 côtés étonnamment simple qui remplit pourtant les conditions pour être un Einstein. Ou plutôt, être le premier Einstein. Cette propriété vient d'être démontrée par l'informaticien Craig Kaplan, vers qui Smith s'est tourné lorsqu'il a pris connaissance de sa découverte, en collaboration avec d'autres mathématiciens, dans un article qui a révolutionné la communauté mathématique. D'autant plus que le dessin découvert n'est pas unique, mais seulement le premier d'un continuum d'Einstein obtenus en modifiant le rapport et la taille des côtés de la forme originale du chapeau.

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